Biomediqa groupe investit dans les biotechnologies de précision en santé humaine

Biomediqa groupe investit dans les biotechnologies de précision en santé humaine

Biomediqa Groupe, acteur discret mais résolument ambitieux du secteur de la santé, fait une entrée remarquée dans l’arène des biotechnologies de précision. En investissant dans plusieurs entreprises innovantes positionnées sur la médecine personnalisée, le groupe confirme une stratégie alignée sur les grandes tendances du marché mondial de la santé, où biologie, intelligence artificielle et données convergent pour redessiner les usages médicaux. Focus sur l’évolution d’un acteur qui entend peser dans la transformation du modèle thérapeutique.

Biomediqa Groupe, un profil hybride entre santé et technologie

À première vue, Biomediqa peut sembler à contre-courant de l’effervescence startup que l’on observe dans la biotech. Fondé dans les années 2000, le groupe s’est d’abord développé sur des segments classiques de l’industrie de la santé : dispositifs médicaux, diagnostics in vitro et infrastructures hospitalières. Mais depuis 2021, une inflexion stratégique s’opère. Biomediqa pivote doucement, mais sûrement, vers des investissements à forte composante technologique, avec une appétence nouvelle pour les approches biomédicales de précision.

« Nous sommes à un moment charnière où la technologie ne soutient plus seulement la médecine, elle la modèle. Refuser cette réalité, c’est prendre le risque de sortir du jeu dans dix ans », résume Claire Dubois, directrice stratégie et innovation du groupe, issue elle-même de la pharma.

Une stratégie d’investissement ciblée sur la médecine de précision

Le positionnement de Biomediqa est clair : soutenir les technologies qui permettent d’affiner le diagnostic, d’anticiper les réponses thérapeutiques, et d’individualiser les traitements. Depuis début 2023, le groupe a réalisé pas moins de quatre prises de participation dans des startups innovantes, représentant un ticket global de 74 millions d’euros.

  • GeneInsight Therapeutics – startup française spécialisée en pharmacogénomique. Sa technologie permet de prédire la réponse d’un patient à un médicament à partir de son profil génétique.
  • BiomaSymbios – société belge œuvrant sur le microbiote digestif et ses interactions avec les maladies métaboliques chroniques.
  • NanoDX AI – jeune pousse suisse qui combine IA et biomarqueurs multiplexés pour diagnostiquer précocement les cancers ORL peu symptomatiques.
  • Circulab Life – plateforme de biopsie liquide ayant développé une signature sanguine pour anticiper les récidives post-chirurgicales dans le cancer colorectal.

Des domaines de niche, certes, mais à fort potentiel industriel, avec des applications cliniques concrètes à court ou moyen terme. Ce portefeuille d’investissements permet aussi à Biomediqa d’ouvrir un pipeline de collaborations croisées entre ses filiales historiques et ces nouvelles entités.

Un prisme B2B assumé : créer des synergies industrielles

Ce qui distingue Biomediqa de nombreux fonds d’investissement ou incubateurs healthtech ? Sa volonté assumée de créer de la valeur par intégration verticale. Contrairement à d’autres acteurs qui misent sur la rentabilité via la revente de participations à horizon 5 à 8 ans, Biomediqa privilégie un modèle B2B collaboratif : intégrer les solutions développées par les startups dans ses propres solutions industrielles et réseaux cliniques.

Un exemple illustratif : les algorithmes prédictifs de GeneInsight seront bientôt déployés dans les centres de soins ambulatoires partenaires de Biomediqa, via une interface logicielle intégrée à leurs plateformes de prescription. « En gérant à la fois l’amont technologique et l’aval clinique, on devient capables de capter une chaîne de valeur élargie », indique Claire Dubois. Un choix qui suppose des investissements de moyen terme, mais promet des retombées durables.

Un ancrage européen, une ambition internationale

Si la majorité des investissements récents de Biomediqa visent l’Europe, le groupe commence à regarder au-delà du continent, notamment vers l’Amérique du Nord et l’Asie du Sud-Est. Un mouvement logique, compte tenu du dynamisme des écosystèmes santé-tech à Boston, Toronto ou encore Singapour, où les approches de médecine personnalisée sont déjà portées à l’échelle clinique.

Le groupe a d’ailleurs annoncé en avril 2024 l’ouverture prochaine d’un bureau à Montréal, en partenariat avec deux centres hospitaliers universitaires québécois. Objectif : nouer des collaborations scientifiques avec des instituts de recherche spécialisés en génomique et IA, tout en renforçant ses capacités de co-développement extra-européennes.

Dans ce cadre, Biomediqa bénéficie du soutien de Bpifrance et d’EIT Health, qui encouragent les initiatives de maillage international pour les innovations en santé. « L’Europe seule ne peut pas faire émerger un champion global de la biotechnologie de précision, il faut construire des ponts », soutient Frédéric Mallet, directeur de l’innovation ouverte chez Biomediqa.

Vers une plateforme de soins intégrée, centrée sur le patient

Derrière cette stratégie financière se dessine un projet industriel exprimé avec clarté : construire une plateforme de soins connectée, fondée sur une logique de prévention, de personnalisation et de prédictibilité. Le triptyque fondateur de la « santé de précision » que Biomediqa entend faire évoluer d’un concept théorique à une expérience patient réelle.

Le groupe travaille actuellement sur le développement d’un dossier médical enrichi, croisant données génomiques, historiques de santé et profils microbiens pour accompagner le praticien dans ses décisions thérapeutiques. L’outil – encore en phase pilote – est d’ores et déjà testé dans un réseau de cliniques partenaires en région PACA.

« Notre ambition est qu’un médecin puisse, à partir de quelques interfaces simples, anticiper une complication, éviter un surdosage ou choisir une molécule adaptée dès le premier essai. Cela allège les coûts tout en améliorant le vécu du patient », explique Claire Dubois.

Cap vers la production avec une logique durable

Outre son intérêt pour les solutions logicielles et les diagnostics prédictifs, Biomediqa porte aussi attention à l’industrialisation des outils biotech. En avril 2024, le groupe a notamment rejoint un consortium public-privé dans les Hauts-de-France, dédié à la bioproduction de principes actifs personnalisés, en lien avec des plateformes de médecine régénérative.

Cette démarche repose sur une vision long terme : au-delà du logiciel, produire des molécules, des outils diagnostics ou des biomatériaux sur-mesure, issus de sources biologiques durables (levures modifiées, fermentation, cellules souches personnalisées). Une manière proactive d’anticiper la demande croissante de traitements personnalisés, tout en assurant une traçabilité réglementaire et un contrôle qualité accru.

De fait, une part croissante de l’investissement R&D du groupe (près de 18 % en 2023) est aujourd’hui fléchée vers ces technologies de production « flexible et verte ». Biomediqa a même annoncé l’ouverture d’un site pilote à Dunkerque fin 2024, appuyé par une subvention régionale et le soutien de France 2030.

Une équipe renforcée pour piloter l’innovation

Pour orchestrer cette montée en puissance sur les biotechnologies de précision, Biomediqa a sensiblement renforcé son équipe exécutive. Ont récemment rejoint le board :

  • Dr Éloïse Karimi, ex-directrice R&D chez Illumina Europe
  • Jean-Hugues Fontaine, ancien directeur Medtech chez Capgemini Invent
  • Lucile Navarro, data-scientist experte en santé numérique (ex-CNRS & start-up)

Les profils illustrent une volonté claire : créer un pont entre science, ingénierie logicielle, et stratégie industrielle. Une hybridation de compétences indispensable pour opérer efficacement dans l’environnement complexe et réglementé que représente la biotech santé de 2024.

Une stratégie en phase avec les attentes du marché

Avec une croissance annuelle estimée à +12 % pour la médecine de précision à l’échelle mondiale, et des attentes très fortes en matière d’efficacité thérapeutique, le choix stratégique de Biomediqa semble s’inscrire dans une trajectoire convergente avec les signaux économiques. Entre pressions sur les coûts de la santé publique et besoin d’outils personnalisés pour les patients chroniques ou en oncologie, l’heure est au ciblage intelligent et à l’agilité thérapeutique.

Pour autant, la route est semée d’obstacles : validation réglementaire longue, interopérabilité des systèmes hospitaliers, contraintes de confidentialité… Le groupe semble en avoir pleinement conscience, en témoigne sa politique “essai terrain avant commercialisation”, son maillage clinique et son ancrage dans des pôles de compétitivité comme Medicen ou EuroBiomed.

Alors, Biomediqa sera-t-il un consolidateur de l’écosystème biotech santé à l’échelle européenne ? Difficile à dire, mais la trajectoire engagée en 2024 laisse penser qu’il ne s’agit plus d’un simple investisseur opportuniste. En s’attaquant à la chaîne de valeur complète, de la découverte à l’implémentation, le groupe pourrait bien redéfinir les contours d’une médecine aussi précise qu’efficiente, au service concret du patient.